La procédure est définie par le Code de l’expropriation. Le Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique définit la notion d’expropriation dans son premier article :
L’expropriation, en tout ou partie, d’immeubles ou de droits réels immobiliers ne peut être prononcée qu’à la condition qu’elle réponde à une utilité publique préalablement et formellement constatée à la suite d’une enquête et qu’il ait été procédé, contradictoirement, à la détermination des parcelles à exproprier ainsi qu’à la recherche des propriétaires, des titulaires de droits réels et des autres personnes intéressées. Elle donne lieu à une juste et préalable indemnité.
Ainsi cet article est clair. Cette procédure est strictement encadrée par la loi pour protéger les droits immobiliers des propriétaires. Et le Code de l’expropriation fixe plusieurs conditions pour requérir à cette procédure :
La phase administrative est la première étape de la procédure d’expropriation. Elle se subdivise elle-même en plusieurs étapes.
Elle débute par le dépôt d’un dossier par l’autorité expropriante.
Les articles R112-4 à R112-6 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique précise le contenu de ce dossier en fonction de la nature de l’opération envisagée.
Ainsi, entre autre exemple, lorsque la déclaration d’utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d’ouvrages, le dossier doit comprendre notamment :
Par ailleurs si le projet est susceptible d’affecter l’environnement et entre dans les catégories listées à l’article R122-2 du Code de l’environnement des éléments complémentaires listés à l’article R123-8 du Code de l’environnement seront nécessaires.
Ce dossier est ensuite transmis à l’autorité administrative compétente pour prendre la déclaration d’utilité publique.
Une fois le dossier déposé l’autorité lance alors une enquête préalable permettant d’apprécier l’utilité publique du projet
La déclaration d’utilité publique (DUP) du projet, qui est une condition sine qua non pour pouvoir procéder à l’expropriation.
Ce dossier est ensuite transmis à l’autorité administrative compétente qui prendra la déclaration d’utilité publique.
Avant tout cette autorité lance alors une enquête préalable permettant de déterminer l’utilité publique du projet.
Il existe 2 types d’enquêtes dans le cadre d’une Déclaration d’utilité publique :
Au terme de l’enquête, si l’avis est favorable, et si l’expropriant n’a pas renoncé à son projet, l’utilité publique est déclarée.
Dans la très grande majorité des cas, la DUP est prise par un arrêté préfectoral ou par un arrêté conjoint des différents préfets compétents lorsque l’emprise de l’opération porte sur le territoire de plusieurs départements. La déclaration d’utilité publique précise le but de l’opération poursuivie doit être indiqué, ainsi que les travaux à exécuter, les acquisitions immobilières nécessaires à la réalisation du projet et le délai pendant lequel l’expropriation devra être.
La notion d’utilité publique qui se rapproche de celle de l’intérêt général est définie par la jurisprudence.
L’évolution de la jurisprudence a abouti dans lequel le Conseil d’Etat a examiné les avantages et les inconvénients de l’opération envisagée et a dégagé un considérant de principe toujours d’actualité :
Une opération ne peut être légalement déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente
Cet arrêt fixe la « théorie du bilan ».
Par la suite, d’autres intérêts seront également pris en compte par le juge administratif pour apprécier l’existence d’une utilité publique.
Il en est ainsi des « atteintes à la propriété privée », du « coût financier » et des « inconvénients d’ordre social », le Conseil d’État a ajouté « l’atteinte à d’autres intérêts publics ». Le Conseil d’Etat prend également en compte la notion d’impact à l’environnement :
Que les atteintes graves portées par le projet à ces zones d’intérêt exceptionnel excédent l’intérêt de l’opération et sont de nature à lui retirer son caractère d’utilité publique
Une fois l’utilité publique de l’opération établie, l’autorité administrative mettre en place une enquête parcellaire.
Cette dernière a pour objet de déterminer avec précision les biens situés dans l’emprise du projet.
De même elle permet d’identifier avec exactitude leurs propriétaires. Une fois la DUP obtenue avant ou après l’arrêté de cessibilité, l’autorité expropriante notifie les propriétaires concernés et entame les discussions pour le rachat amiable des biens.
Suite à la clôture de l’enquête parcellaire, le préfet a la possibilité de déclarer les immeubles comme étant « cessibles » par le biais d’un arrêté de cessibilité. Cet acte administratif, dont le régime est fixé par les articles R132-1 et suivants du Code de l’expropriation, constitue le fondement légal de l’expropriation, bien que l’expropriant conserve la liberté de ne pas engager la procédure.
Il est important de noter que le Code de l’expropriation ne fixe pas de délai entre la clôture de l’enquête parcellaire et l’émission de l’arrêté de cessibilité, comme l’a confirmé la Cour de cassation.
L’émission de l’arrêté de cessibilité demeure de la compétence exclusive du préfet, même si le projet a été déclaré d’utilité publique par un arrêté ministériel ou un décret en Conseil d’État.
L’arrêté de cessibilité doit obligatoirement inclure la description détaillée des immeubles concernés ainsi que l’identification précise des propriétaires. L’arrêté de cessibilité fait l’objet d’une notification individuelle à chaque propriétaire intéressé. Le délai de recours démarre exclusivement à compter de cette notification.
Si aucun accord n’est trouvé, l’autorité peut alors engager la procédure d’expropriation et saisir le juge de l’expropriation. Si la phase administrative ne débouche pas sur un accord, l’expropriation entre dans sa phase judiciaire. Cette étape implique le recours à la justice pour déterminer les conditions de l’expropriation et l’indemnisation due au propriétaire.
Le juge de l’expropriation, qui est un magistrat du tribunal judiciaire, est alors saisi pour statuer sur la légitimité de l’expropriation et sur le montant de l’indemnisation.
« La juridiction de l’expropriation mentionnée à l’article L13-1 a son siège auprès du tribunal de grande instance du chef-lieu du département ».
Cette phase peut être complexe et nécessite souvent l’intervention d’experts pour évaluer la valeur du bien exproprié.
Seul le préfet est autorisé à acheminer le dossier au juge de l’expropriation. Ce dernier le fait par le biais de l’envoi au greffe du tribunal judiciaire compétent de toutes les pièces obligatoires.
L’évaluation de l’indemnité est une étape cruciale dans la procédure d’expropriation.
En application de l’article 545 du Code civil, la prise de possession d’un bien exproprié ne peut intervenir sans le versement d’une « juste et préalable indemnité ». Plus précisément, le Code de l’expropriation énonce la règle de la réparation intégrale :
« les indemnités allouées doivent couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l’expropriation ».
L’indemnité d’expropriation comprend une indemnité principale, à laquelle peuvent s’ajouter des indemnités accessoires.
L’indemnité principale compense le préjudice subi par le propriétaire du fait de la perte de son bien.
Durant la procédure d’expropriation, l’expropriant notifie le montant de ses offres et invite les expropriés à faire connaître le montant de leur demande dans les conditions prévues aux articles R311-4 et suivants du Code de l’expropriation.
Ces derniers disposent d’un délai d’un mois pour faire connaitre leur position.
A défaut d’accord dans le délai d’un mois à compter soit de la notification des offres de l’expropriant le juge peut être saisi par la partie la plus diligente.
En effet en application de l’article L311-5 du Code de l’expropriation :
« A défaut d’accord sur le montant des indemnités, celles-ci sont fixées par le juge de l’expropriation ».
Les parties sont tenues de constituer avocat. L’Etat, les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics peuvent se faire assister ou représenter par un fonctionnaire ou un agent de leur administration.
Le mémoire de saisine est adressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au greffe de la juridiction du ressort dans lequel sont situés les biens à exproprier. Il est accompagné de deux copies.
Certaines mentions obligatoires doivent figurer dans ce mémoire conformément aux articles R311-9 et suivants du Code de l’expropriation.
L’indemnisation doit refléter de manière juste la valeur réelle du bien, prenant en considération divers critères tels que la localisation géographique, l’état du bien, son utilisation actuelle et potentielle, ainsi que les prix du marché immobilier local.
L’objectif de cette indemnisation est de permettre au propriétaire exproprié d’acquérir un bien équivalent. Dans cette optique, des experts peuvent être sollicités pour fournir une estimation objective.
Pour déterminer la valeur vénale du bien, le juge a fréquemment recours à une évaluation comparative afin d’obtenir une estimation aussi fidèle que possible à la réalité du marché immobilier. Il peut avoir recours à des expertises à la demande ou non des parties.
Le Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique n’impose pas de méthode pour fixer le montant de l’indemnité d’expropriation. Toutefois les juridictions civiles et notamment la Cour de cassation statuent souverainement sur le montant des indemnités correspondant aux caractéristiques des terrains expropriés.
Les juges du fond ont, s’agissant de l’évaluation des terrains, le plus souvent recours à la méthode « par comparaison » qui n’est toutefois, comme l’a estimé la Cour de cassation qu’une simple « méthode d’évaluation des biens expropriés que les juges du fond peuvent souverainement retenir ». Il conviendra alors de transmettre, pour l’évaluation de cette indemnité, des points de comparaison permettant d’apprécier et de comparer le bien objet de l’expropriation. Les services des domaines peuvent être saisis à cet effet.
La Déclaration d’Utilité Publique (DUP) ainsi que l’arrêté de cessibilité sont susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation devant le tribunal administratif (TA) du ressort de la préfecture, étant donné que le préfet est l’auteur de l’acte litigieux. Ce recours en excès de pouvoir peut être assorti d’un référé-suspension visant à suspendre les effets de la DUP ou de l’arrêté de cessibilité, entraînant ainsi la paralysie de la procédure d’expropriation jusqu’à ce que le tribunal se prononce sur le fond. La suspension de la DUP ou de l’arrêté de cessibilité peut intervenir en cas d’urgence avérée et en présence d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision.
Il est impératif d’initier ces recours dans un délai de deux mois à compter des mesures de publicité ou de notification.
En l’absence d’accord sur le montant de l’indemnisation le juge de l’expropriation peut être saisi.
En application de l’article L311-5 du Code de l’expropriation :
« A défaut d’accord sur le montant des indemnités, celles-ci sont fixées par le juge de l’expropriation ».
Il conviendra alors de saisir le juge de l’expropriation d’un mémoire aux fins de fixation de l’indemnité en apportant des éléments de comparaison.
En somme, la procédure d’expropriation, un processus légal incontournable, requiert une conduite empreinte d’équité et de transparence. L’indemnisation, véritable pierre angulaire, est cruciale pour préserver les droits des propriétaires. Ainsi, une information claire sur les droits et les étapes de la procédure est impérative pour que les propriétaires concernés puissent recevoir une compensation juste et adéquate.
Il est important de retenir que même en cas d’accord sur le principe de l’expropriation le montant de l’indemnisation peut être contestée.