Récemment, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Vannes a été amené à rendre une décision dans le cadre d’un litige qui opposait des maîtres d’ouvrage à un constructeur de maisons individuelles suite à un chantier s’étant déroulé à Ploërmel.
Les maîtres de l’ouvrage avaient régularisé un contrat de construction de maison individuelle (CCMI) au mois de mars 2017. Les travaux ont fait l’objet d’une réception avec réserves au cours de l’état 2019. Légitimement, les maîtres d’ouvrage ont consigné la retenue de garantie de 5% dans l’attente de la levée des réserves.
Le constructeur ne s’étant pas exécuté, les maîtres d’ouvrage ont sollicité en référé la désignation d’un expert judiciaire. A l’issue du dépôt du rapport de ce dernier, les maîtres d’ouvrage ont introduit une procédure au fond devant le tribunal judiciaire, lequel a rendu un jugement fin 2021 aux termes duquel le constructeur de maison individuelles a été condamné à exécuter un certain nombre de travaux de reprise.
Prescription de l’action en paiement et règles légales
Ces derniers travaux ont été réalisé et ont fait l’objet d’une réception au printemps 2022. Ce n’est cependant que fin 2024 que le constructeur a initié une procédure afin d’obtenir le règlement du solde de son marché correspondant à la retenue de garantie de 5 % consignée par les maîtres d’ouvrage.
En notre qualité de conseil des maîtres d’ouvrage, nous avons alors soulevé la prescription de la demande formulée par le constructeur par le biais de conclusions d’incident devant le juge de la mise en état.
Dans son ordonnance, le juge de la mise en état souligne, comme nous le soutenions, que la demande du constructeur est prescrite.
En effet, l’action en paiement intentée par un professionnel à l’encontre d’un consommateur en application de l’article L 128-2 du code de la consommation prévoit un délai de prescription de 2 ans.
L’article R 231-7 du code de la construction et de l’habitation applicable au contrat de construction de maisons individuelles prévoit que : « le solde du prix est payable dans les conditions suivantes :
- Lorsque le maître de l’ouvrage se fait assister, lors de la réception, par un professionnel mentionné à l’article L 231-8, à la levée des réserves qui ont été formulées à la réception ou, si aucune réserve n’a été formulée, à l’issue de la réception,
- Lorsque le maître de l’ouvrage ne se fait pas assister par un professionnel pour la réception, dans les 8 jours qui suivent la remise des clés, consécutive à la réception, si aucune réserve n’a été formulée, ou, si des réserves ont été formulées, à la levée de celles-ci.
Dans le cas où des réserves sont formulées une somme au plus égale à 5% du prix convenu est, jusqu’à la levée des réserves, consignée entre les mains d’un consignataire, accepté par les deux parties ou, à défaut, désigné par le président d tribunal judiciaire ».
Il s’en suit que la prescription de la demande en paiement du solde des travaux, lorsque la réception a été faite d’une part par le maître de l’ouvrage non assisté par un professionnel et d’autre part, avec des réserves, a pour point de départ la levée des réserves.
En l’espèce, la réception des travaux avait été faite avec réserves au mois de juillet 2019, puis un jugement du tribunal judiciaire avait condamné le constructeur à exécuter des travaux de reprise et ces travaux avaient été réceptionnés en avril 2022.
Décision du juge de la mise en état et irrecevabilité de la demande
Selon le juge de la mise en état, cette nouvelle réception, en l’absence de nouvelles réserves, emporte levée des réserves que les travaux étaient destinés à reprendre.
Il s’agit donc tout à la fois d’une réception de travaux et d’une levée de réserves.
L’action en justice ayant été introduite au mois d’octobre 2024, cette action a logiquement été jugée irrecevable comme prescrite.
